• Le Rouge et le Rose

    Ecrire un texte parlant d'une couleur

     

    Je cherchais ce matin dans le dictionnaire, pour des raisons qui ne concernent que moi, les synonymes ou les nuances des mots qui expriment la couleur rouge. J'y ai d'abord trouvé des choses assez banales, ne dépassant pas la désignation du premier degré, la comparaison élémentaire avec un fruit, un animal ou une matière : rouge cerise, rouge groseille, rouge fraise, rouge framboise, rouge comme une tomate, comme une écrevisse, comme un rubis. L'utilisation de ces termes dans une description, tout en affinant et précisant la vision de ce qui est décrit, ne va cependant pas bien loin, car rien ne s'y cache qui pourrait faire naître l'émotion au travers de la liberté d'une interprétation, voulue par l'auteur ou inventée par le lecteur.

    Mais ensuite, il y a des découvertes à faire, à manier parfois avec précaution. Ainsi, dans garance, il y a du rance et dans cramoisi, on trouve du moisi. A éviter si on ne veut pas vexer ceux dont on parle en ces termes...Il en va de même avec vermeil, le ver est dans le fruit et la carte du même nom dans le cabas. Ou avec pourpre, ou purpurin, ce dernier pouvant servir dans certains paysages champêtres...

    A l'opposé, si on consent à errer quelque peu autour du rouge, cela peut devenir un festival d'émotions érotiques : le rouge feu pour la passion, mais celle-ci ne donne pas en général dans la nuance, et oublie tout quand elle commence à s'exprimer. Le teint de pêche des jeunes filles, virant au rose bonbon au moindre battement de cœur, puis à l'incarnat sous un regard appuyé...Les bas couleur chair, travestissant la nudité... Et pour couronner cet inventaire, à quoi pouvaient-ils donc penser, nos ancêtres jardiniers, de sacrés gaillards, de sacrés paillards, en disant de certaines roses qu'elles avaient une teinte « cuisse de nymphe émue »...Ah la nymphe, on l'imagine bien ! Ah ses cuisses, trop souvent invisibles ! Ah son émotion, peut-être une invite, peut-être une envie cachée derrière la timidité ? Même s'il faut ensuite retomber sur terre quand quelqu'un vient vous dire, devant un verre de vin rosé, que « la cuvée de cette année est d'une belle couleur cuisse de nymphe émue »...On peut contester, certes, mais on peut aussi imaginer un Dyonisos rubicond, tirant une langue écarlate, poursuivant dans les vignes des nymphes rosissantes...

     

     


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