• FRACAS

    Décrivez la souffrance d'une personne à la manière de Jacques Prévert dans : "La grasse matinée"

     

    Il est assourdissant

    le silence interminable de l'attente

    il est assourdissant ce silence

    quand il résonne dans la tête de l'enfant qui a peur

    il est assourdissant aussi parce que l'enfant est sourd

    sourd d'avoir entendu trop souvent

    le fracas des bombes qui tombent

    au-dessus de lui, sur sa maison, sur ses amis

    sur les autres enfants qui attendent

    que tout cela s'arrête

    pour qu'il puisse enfin jouer

    qu'il n'oublie pas ce que c'est que jouer

    que jouer ce n'est pas seulement jouer à la guerre

    sortir un pistolet

    en plastique

    et faire « pan » ! et faire « boum » !

    et faire semblant d'être mort

    comme les morts qu'il voit tous les jours

    dans les ruines

    dans les caves

    dans les rues

    c'est devenu presque normal

    c'est ça qui est normal

    et l'école, parfois, entre des murs sans toit

    est aussi comme un jeu

    que l'on pratique quand on le peut

    en attendant l'obus

    le prochain

    celui qui, peut-être, l'emportera,

    mais il n'y pense pas, il joue, il rit,

    ça dure un moment

    même s'il a peur

    même s'il a faim, même s'il a soif

    et soif aussi que ça s'arrête

    ça ne peut pas durer

    et pourtant ça dure

    depuis des mois

    puis des années, et si ça dure,

    c'est dans les flots qu'il finira

    dans la mer où il flottera

    pour aller là où on ne l'attend pas

    là où on ne le veut pas

    mais où l'attente n'aura pas

    ce goût terrible du fracas

    que le silence ici promet.

    Il est assourdissant,

    le silence interminable de l'attente.

    il est assourdissant ce silence

    quand il résonne dans la tête de l'enfant qui a peur


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment



    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :